La charge d'entraînement: établir sa validité
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14 Feb, 2024
Méthodologie
type-trait
Sports d'endurance

Beaucoup d’athlètes utilisent une charge d'entraînement qui ne correspond pas à leur pratique, ce qui biaise la prescription des séances. Le sujet est très vaste et controversé. Est-ce que les calculs actuels de la charge d'entraînement reflètent entièrement les stress de la dose d’entraînement ? Et sur quel critère de validité peut-on se fier ? Est-ce que les calculs de charge d'entraînement sont validés scientifiquement ?

 

  • Banister (TRIMP) démontre que la charge d'entraînement d’un athlète peut prédire les variations de la performance mais est-ce une mesure valide de la charge d'entraînement ?

Banister ⇒ charge d'entraînement = (durée x k x FC-réserve) de la séance

Dans ce calcul, k est un coefficient exponentiel et dépendant de la FC-réserve.

 

  • Foster (RPE) constate que le RPE est un excellent moyen de monitorer les athlètes pour détecter et prédire du surentraînement, d’une maladie ou au contraire du niveau de forme de l’athlète.

Foster ⇒ charge d'entraînement = (durée x RPE) de la séance.

 

  • Coggan (TSS) atteste que la puissance peut être normalisée et servir de quantification. Comme TRIMP, ces méthodes utilisent un facteur d’intensité qui n’est pas individualisé.

Coggan ⇒ charge d'entraînement = (durée x PN² / FTP) / (FTP x 3600) x 100

Dans ce calcul, PN est la puissance normalisée et FTP est la puissance maximale théorique pouvant être maintenue pendant 1 heure d’effort.

 

L’équipe australienne de Wallace (2014) montre qu’en se basant sur la consommation d’oxygène comme critère de validité, TRIMP et le RPE sont des charges d'entraînement valides pour l'entraînement aérobie, ce qui sera critiqué par l’équipe Britannique de Passfield (2022). Le modèle de charge d'entraînement de Mauna souhaite surmonter les limites évoquées dans ces articles en prenant en compte la fatigue physiologique, biomécanique et psychologique en mêlant des variables objectives et subjectives.

 

Pour le moment, ces “charges d'entraînement” sont incomparables en raison des différences notables entre les deux facteurs principaux : la durée et l’intensité des séances. Finalement, des erreurs d’interprétation ont mené les athlètes, entraîneurs et scientifiques à utiliser cette mesure comme une valeur fiable et indispensable. À ce propos, les calculs de la charge d'entraînement actuels ont tous des limites majeures qu’il est nécessaire de discuter dans un prochain article pour prévenir ceux qui les utilisent. Brièvement, les séances longues sont surestimées (TRIMP, durée*RPE, TSS), la fatigue musculaire n’est pas forcément prise en compte (TRIMP), tout comme les difficultés psychologiques (TRIMP et TSS).

 

L’argument fallacieux dont il faut se méfier : “Oui mais si on utilise toujours la même charge d'entraînement pour comparer nos séances, ça suffit non ?”. Le problème de cette fausse solution c’est que vous allez comparer l’incomparable. Au fil des cycles d'entraînement, vous allez confronter des séances très courtes et intenses avec des séances longues et peu intenses, et avec des séances techniques, continues,  intermittentes, etc…


→ Qu’est ce que la charge d'entraînement ? C’est le reflet des stress et de la dose d’entrainement. Autrement dit, c’est la valeur arbitraire qui décrit la dose d’effort induite par la combinaison des variables d’exercice (la modalité, l’intensité, le volume, et l’organisation des exercices).

 

En effet, une seule variable ne peut décrire l’effort dans sa globalité, la charge d'entraînement combine l’influence de plusieurs variables d’exercice. Les variables d’exercice sont les suivantes :

Toutes les variables, notamment l’intensité et la durée de l’exercice, pourraient avoir une importance différente en fonction de chaque athlète. En effet, ces relations sont inhérentes aux caractéristiques individuelles et elles sont non linéaires. C’est pourquoi nous avons besoin d’un système complexe pour s’intéresser à la contribution relative de l’intensité et de la durée dans la charge d'entraînement.

 

La charge d'entraînement considère à la fois le travail effectué, mais aussi les réponses individuelles à l’exercice. Le travail effectué correspond à la charge d'entraînement externe tandis que les réponses individuelles à l’exercice correspondent à la charge d'entraînement interne. Ces charges s’appuient sur des données subjectives et objectives. 3 points à ce sujet :

 

(1) Toutes les données (FC, puissance, RPE…) doivent être prises en compte selon un contexte et ont des limites. Utiliser de nombreuses données et croiser les informations est la procédure la plus pertinente pour avoir une fine représentation de la réalité.

 

(2) À choisir entre une donnée subjective et une donnée objective, c’est la valeur subjective qui prône.

 

(3) Monitorer aucune donnée et s'entraîner “à la sensation” n’est pas dénué de sens, cette méthode sera simplement limitée et non itérable lorsque l’athlète souhaite atteindre son plein potentiel.

 


Qu’est-ce que la validité ? C’est le degré de reflet d’une mesure. Dans le cas de la charge d'entraînement, on parle d’une mesure qui reflète la dose ou stress d'entraînement.

 

Cependant, il n’y a pas de critère de validité complètement établi pour la mesure de la charge d'entraînement et une valeur unique doit correspondre à l'entraînement effectué. Un exemple de critère pourrait être la consommation d’oxygène à l’exercice ou l’effet immédiat que l'entraînement procure sur la performance, c’est-à-dire la fatigue.

 

La consommation d’oxygène est biaisée dès lors que les athlètes font état d’une fatigue musculaire (via des contractions excentriques qui vont créer des courbatures par exemple) et ne reflète pas la difficulté psychologique de l'entraînement.

 

Dans le but de valider le concept de la charge d'entraînement, on pourrait par exemple chercher à quantifier la diminution aiguë ou le déclin des performances afin de comprendre la contribution relative de l’intensité, de la durée et de l’organisation des séances. La dose d'entraînement serait alors reflétée par la magnitude du déclin de performance. De plus, mesurer le déclin de performance serait sensible à la variété de l’environnement (chaleur, altitude, glycogène, fatigue musculaire/mental…).

 


La mesure de la charge d'entraînement de Mauna a été construite à la suite d’une revue de littérature et tente de lisser un maximum de biais. Nous souhaitons créer une modélisation représentative de la réalité grâce à:

 

  1. Un recueil de données sur un suivi long.
  2. Des tests sur des modèles qui pourraient permettre de détecter si possible certaines blessures.
  3. Une validation scientifique de ces modèles.
  4. Des outils d’aide à la décision que nous proposerons au staff/coach/athlètes…

 

Ces recherches sur la charge d'entraînement pourraient servir aux athlètes et aux entraîneurs à mieux quantifier les semaines d'entraînement et pour mieux prescrire l'entraînement.

 


Référence:

  • McLaren, S. J., Shushan, T., Schneider, C., & Ward, P. (2022). Comment on Passfield et al: Validity of the Training-Load Concept. International Journal of Sports Physiology and Performance17(10), 1457-1457.
  • Passfield, L., Murias, J. M., Sacchetti, M., & Nicolò, A. (2022). Validity of the training-load concept. International journal of sports physiology and performance17(4), 507-514.
  • Slattery, K. M., Wallace, L. K., & Coutts, A. J. (2022). Comment on Passfield et al: defending the use of oxygen uptake as a criterion measure for training load. International Journal of Sports Physiology and Performance17(10), 1458-1459.
  • Wallace, L. K., Slattery, K. M., Impellizzeri, F. M., & Coutts, A. J. (2014). Establishing the criterion validity and reliability of common methods for quantifying training load. The Journal of Strength & Conditioning Research28(8), 2330-2337.

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